08
mars
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Le 8 mars est la Journée internationale des droits des femmes. A cette occasion, il est bon de se questionner sur la place qu'occupent les femmes dans des domaines se voulant encore majoritairement masculins. Nous, étudiantes à l’INSA Strasbourg suivant le parcours DeutschINSA, souhaitons mettre à l’honneur aujourd'hui le témoignage d'une femme. Nous avons donc rencontré Élodie Gaberan, diplômée en génie électrique de la promotion 2013 de l’INSA Strasbourg, qui faisait partie de la première promotion DeutschINSA, et qui est aujourd'hui ambassadrice de la mixité professionnelle. L’interview est aussi disponible au format vidéo sur le compte Instagram @DeutschINSA

Pour quelles raisons as-tu choisi DeutschINSA et qu’est-ce que ça t’a apporté ? 

J’ai choisi la filière DeutschINSA car ça m’a paru comme une suite logique à mon parcours puisque en lycée j’ai fait un Abibac et que je souhaitais intégrer une filière technique dans une école d’ingénieur, donc quand j’ai découvert la possibilité DeutschINSA, je n’ai pas hésité. Ce que m’a apporté la filière DeutschINSA, c’est d’abord et avant tout les amis les plus précieux que j’ai aujourd’hui. Humainement, c’était une aventure extraordinaire, qui ne s’est jamais arrêtée au final. Au niveau des études, ça m’a permis d’intégrer un groupe assez restreint et tous les cours en allemand se faisaient dans ce groupe, donc beaucoup plus interactif que les groupes en amphi traditionnel. Par la suite, ça m’a permis de faire des stages en Allemagne, et un semestre à l’étranger à l’université de Karlsruhe, ce qui était très enrichissant également. Ensuite dans la vie active, je suis restée en Alsace. Ça m’a ouvert des portes dans la mesure où il y a pas mal de grosses entreprises alsaciennes qui travaillent avec l’Allemagne ou qui ont des sièges en Allemagne. J’ai même eu l’occasion de travailler quelque temps dans une entreprise basée en Allemagne. Personnellement ça m’a permis de perfectionner mon allemand .

Dans quel domaine/entreprise est-ce que tu travailles et quelles sont tes fonctions ?

Je me suis consacrée au développement de logiciels embarqués dans des entreprises spécialisées dans le domaine de l’électrique, donc d’équipements électriques, et plus récemment dans le domaine de la RFID. Sur ce dernier poste, j’ai aussi eu l’occasion de faire de la gestion de projet avec du support technique aux clients et du SAV.

Est-ce que tu travailles dans un contexte franco-allemand / international ?

J’ai eu l’occasion de travailler sur un projet qui a été mené par l’Allemagne  dans une entreprises dans laquelle j‘ai travaillé. Avoir étudié la technique en allemand pendant mes années DeutschINSA à été utile. J’ai également eu l’occasion de travailler dans un groupe de normalisation à l’AFNOR, groupe européen, avec quasiment que des Français et des Allemands. C’était un contexte ou, bien sûr, on parlait en anglais, mais pouvoir communiquer avec les partenaires allemands dans leur langue, c’est toujours un plus apprécié par eux et plus facile aussi pour la communication.

Un conseil pour les (futurs) étudiant·e·s ?

Toujours bien garder confiance en soi me parait primordial, mais pour autant toujours rester humble également et savoir tirer parti des gens qui nous entourent et apprendre de toutes ces personnes, que ce soit des collègues, des amis, des professeurs, des tuteurs, etc… Ne vous arrêtez pas à un parcours scolaire où vous auriez appris uniquement de ce que les professeurs vous ont enseigné. Pour ma part, j’ai choisi de participer au club de robotique de l’école et que ce soit techniquement, humainement ou en terme de travail d’équipe, ça m’a énormément apporté. J’ai appris à travailler en équipe, à gérer une équipe puisque j’ai été présidente pendant deux années, à enseigner aux suivants, à transmettre un savoir technique. Et il parait que ce n’est qu’une fois qu’on sait enseigner quelque chose qu’on le sait vraiment soi-même. Donc il ne faut pas hésiter à suivre d’autres voies pour apprendre que ce soit un club technique ou toute autre vie associative ou projet personnel.

Ressens-tu une différence de traitement en tant que femme dans une industrie majoritairement masculine ?

L’égalité femme-homme, c’est notre sujet du jour. En ce qui me concerne, en arrivant à l’INSA, j’ai reçu le prix de la vocation scientifique, c’est un prix qui est décerné aux jeunes femmes qui vont dans des filières techniques dans lesquelles il y a moins de 20% de femmes, donc typiquement masculines. J’ai eu l’occasion de gagner ce prix et c’est là que je me suis rendu compte qu’effectivement le nombre de femmes restait anecdotique , qu’il pouvait y avoir dans ce genre de filière sans pour autant que je ne perçoive ça comme un problème ou comme quelque chose qui prenait beaucoup de place. Effectivement, dans le cadre de mes études, je n’ai jamais ressenti de différence entre mes collègues étudiants hommes et mes collègues étudiantes femmes.
Par contre, dans le cadre professionnel, j’ai pu ressentir des différences. Ne serait-ce que de par le fait que l’on est entourée de gens de différentes générations, qui n’ont donc pas eu le même historique sur le sujet. Il me vient par exemple une petite anecdote, lors d’un de mes premiers stages où je me suis retrouvée dans une équipe totalement masculine de techniciens sur de la surveillance de réseaux en Allemagne. Dans la salle de pause, il y avait sur le mur quatre calendriers de femmes nues . L’accueil était assez particulier, donc je voyais bien qu’à leurs yeux j’étais vraiment une exception, même s’ils m’ont toujours traité avec beaucoup de bienveillance. C’est quelque chose que j’ai pu observer par la suite aussi globalement, j’ai toujours perçu beaucoup de bienveillance de la part de mes collègues masculins et parfois trop et là on se sent vraiment comme une exception on se demande pourquoi ? Et ce trop-plein de bienveillance se transforme parfois en peut-être un peu moins de confiance aussi et en nécessité pour moi d’avoir à plus prouver ma valeur que les hommes. C’est quelque chose qui revient souvent et que j’ai déjà pu constater chez d’autres femmes qui étaient dans mon cas. On se rend compte qu’on a cette sensation de devoir toujours un peu plus prouver notre valeur que nos collègues hommes. C’est malheureux mais pour l’instant c’est encore comme ça.
Autre petite anecdote : lors de mon projet de fin d’études, j’étais dans un service de développement électronique et logiciel et on m’avait trouvé un joli petit surnom dans le service d’à côté. J’étais “la fille”, la fille parce que seule fille de l’équipe de développement. Cela montre bien qu’effectivement ce sont encore des domaines typiquement masculins. Une dernière petite anecdote : j’ai travaillé pendant un moment sur le terrain dans l’environnement au niveau des camions poubelles sur un système d’identification. J’intervenais sur un camion poubelle qui était déplacé par un chauffeur, je suis allée le voir quand il était au volant pour lui demander de se garer à un endroit où je pourrais intervenir sur le camion. Au moment où il s’est arrêté à ma hauteur, il m’a regardé à travers sa vitre avec des yeux vraiment de frayeur et très interrogatif et il m’a dit : “vous êtes la mécanicienne ?” Et j’ai senti dans ses yeux ce questionnement : mais vraiment une petite femme comme ça, ça peut être mécanicienne ? Alors j’ai pu le rassurer parce que je ne suis pas mécanicienne mais en tout cas ça m’a beaucoup fait rire.

Peux- tu nous présenter ton rôle d’ambassadrice ?

Je suis également ambassadrice de la mixité professionnelle. Ce groupe d’ambassadeurs.drices a été initié et est géré par le CIDFF (centre d’information sur les droits des femmes et des familles) du Bas-Rhin et a pour but de promouvoir la mixité professionnelle. Nous sommes des exceptions, si l’on peut dire, d’hommes qui travaillent dans des domaines typiquement féminins et de femmes qui travaillent dans des domaines typiquement masculins, pour montrer que c’est possible et qu’il n’y a pas de raison qu’il y ait autant de métiers qui soient typés, genrés. On a pour but d’intervenir dans des salons, dans des groupes de personnes en recherche d’emplois, dans des écoles, pour promouvoir cette mixité, pour montrer par l’exemple que oui c’est possible d’être ingénieure dans le domaine informatique ou électrique quand on est une femme ou d’être auxiliaire de puériculture quand on est un homme, j’en passe… Et plutôt que de s’attarder sur les progrès qu’on a encore à faire dans ce domaine de mixité et d’égalité femmes-hommes; on s’attache à montrer du positif, à montrer qu’effectivement ça avance dans le bon sens avec des profils comme le mien.

C’est quoi être leader femme ?

La question m’a fait sourire parce que je n’ai jamais eu l’impression d‘être une leader femme, mais en tout cas c’est flatteur de l’entendre. Du coup, si je devais le décrire je dirais que c’est oser, oser aller aux bouts de ses ambitions, aux bouts de ses projets, toujours persévérer et puis oser s’affirmer et donner son avis. C’est enfin montrer aux autres que c’est possible. C’est important de le faire et de fédérer les autres pour qu’ils osent aussi.

Exemple où la mixité est une réussite

J’aimerai bien vous parler d’un exemple concret que je n’ai pas vécu, mais que j’avais entendu lors d’une conférence et que j’avais bien retenu. Il s’agit d’une entreprise, d’une usine, qui travaille dans un domaine où il faut porter des charges lourdes. Un jour, ils ont embauché une femme pour faire le métier et donc porter ces charges lourdes. Sauf que c’était des charges vraiment très lourdes et pour le coup trop lourdes et quand cette femme est arrivée à ce poste, ils ont de fait ressenti le besoin d’adapter le poste en mettant à disposition des outils pour aider à porter ces charges. Et en fait, il s’avère qu’ils ont eu des retours super positifs de la part également de tous les hommes qui travaillent sur ces postes-là, qui avaient tout autant besoin, de ces outils pour porter ces charges lourdes, mais tant qu’il n’y avait que des hommes dans cette entreprise, cela ne leur a pas paru comme étant nécessaire et utile de le faire. Donc le fait de rajouter une femme à ce poste-là a permis d’ouvrir les yeux sur des choses importantes à tout le monde.

L’interview est aussi disponible au format vidéo sur le compte Instagram @DeutschINSA.

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